Le marché des câbles sous-marins : Une amitié compétitive

Une « Amitié », ce mot défini comme « une inclination réciproque entre plusieurs personnes n’appartenant pas à la même famille » est en réalité le nom donné à un câble sous-marin qui va prochainement agrandir la colonne vertébrale du web.
Ce câble de fibre optique « Amitié » long de 6.800 Km à l’initiative de Facebook et porté par Alcatel Submarine Networks en France. Un investissement de 250 millions d’euros pour relier les Etats-Unis au Royaume-Uni et à la France, plus précisément à la Gironde. Un projet d’envergure qui bouleverse les traditions puisque l’opérateur, en plus de Vodafone pour l’Angleterre et Orange pour la France s’associe à Facebook, l’une des plateformes majeures de la donnée utilisateurs.
En effet, depuis toujours les eaux sont un terrain monopolisé par les opérateurs qui financent la pose de l’infrastructure, moins coûteuse que les satellites, elle permet d’assurer une bonne liaison internet dans le monde avec déjà près de 430 câbles sous-marins. Du fait de l’explosion du trafic international, les opérateurs ouvrent progressivement le financement de ces câbles « nouvelle génération » aux plateformes telles que Google, Facebook, Microsoft, …
Une « amitié » nécessaire à l’heure où la performance doit satisfaire les utilisateurs, mais quels impacts géopolitiques ?
Un impact sur la souveraineté des données
Une véritable compétition s’est lancée entre les puissances mondiales pour être leader sur la pose d’infrastructures sous-marines et pour cause, celui qui possède le câble détient la propriété des données qui transitent et peut, en cas de conflits espionner, voire couper les communications d’un pays ou régions. Plus le pays possède de câbles, plus il a des chances de capter le trafic. Les Etats, unis, la Chine et la Russie l’ont bien compris et devancent grandement l’Europe sur ce sujet inconnu des utilisateurs finaux qui ne savent pas par quels câbles passent leurs données.
En mai 2019, les États-Unis font un embargo face à la société Huawei Marine Networks qui a travaillé sur près d’une centaine de projets de liaisons par fibre optique sur les fonds marins. Accusée d’espionnage à grande échelle, les sociétés américaines se voient interdites de travailler avec l’entreprise chinoise.
Voyant la restriction s’appliquer, l’entreprise réfléchit à un contournement en cédant une partie de Huawei Marine à l’entreprise Hengtong optic-electric pour pouvoir continuer d’amplifier son programme de pose de câbles.
Un impact sur la propriété des données
Les Etats-Unis, pays fondateur du contenu et de la transmission des données au travers des GAFAM, leur ouvre l’accès aux marchés sous-marins. En effet, en participant, les plateformes telles que Google et Facebook apportent le financement nécessaires aux opérateurs pour développer le réseau afin d’assurer un débit suffisant partout pour développer leurs activités et donc recueillir plus de données. Cette stratégie place les Etats-Unis en première place sur le marché mondial. De son côté, l’Europe préfère s’associer à des projets de groupement internationaux plutôt que de les mener avec pour exemple « 2Africa » qui relie les 23 pays d’Afrique, du Moyen Orient, de l’Europe vers l’Asie.
Et pour cause, pour devenir un acteur majeur de la liaison, l’Europe devrait s’orienter vers une indépendance qui impliquerait des investissements dans la recherche, l’industrie, la politique de diffusion et les mesures douanières.
Un impact environnemental
Si l’on en croit les industriels du secteur, le développement sous-marin a un impact très faible sur l’environnement du fait d’un choix minutieux sur les composants. Cependant, la présence seule du plastique sur ces câbles au fond de l’eau soulève des questions. En effet, censé fonctionner vingt-cinq ans, ils ont été conçus pour résister aux ancres des chaluts de pêche qui s’emmêlent, aux séismes sous-marins, aux morsures de requins,… Dès leur fin de vie, rien n’oblige légalement les opérateurs à venir les récupérer.
Un impact sur la confiance mondiale
Enfin, au vu de l’expansion de ce marché compétitif, la suspicion reste le maître mot. Du fait d’une activité grandissante concentrée presque aux mêmes endroits, les renseignements américains gardent l’œil ouvert sur les sous-marins ou autres navires océanographiques qui passent près des câbles dans le but de collecter de la donnée. Donc, dans une société toujours plus innovante, il est important de se questionner sur la qualité de ces « amitiés » sur le long terme pour éviter qu’elle se transforme en guerre.
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