La comitologie, un dispositif de gestion indispensable
L'origine du terme "comitologie" provient de la méthode de surveillance mise en place par l'Union Européenne vis-à-vis des règles et directives rédigées par la Commission Européenne. Ainsi, la comitologie avait pour objectif initial l’expression et la représentation du pouvoir démocratique au sein de la principale institution de l’Union européenne.
On observe ces dernières années une utilisation croissante de la comitologie par les entreprises afin de mener à bien leurs projets en optimisant la mise en place de leur gouvernance. Cela s’observe notamment à travers l’augmentation du nombre d’entreprises certifiées ISO 9001, gage de la qualité des dispositifs organisationnels appliqués au sein d’une entité dans une logique d’amélioration continue. Par conséquent, la comitologie est rapidement devenue une pratique populaire répandue faisant partie intégrante de la stratégie globale mise en place pour mener à bien des projets d’envergure.
La comitologie consiste à établir l’organisation d’un ensemble de réunions visant à structurer une ligne de conduite au sein d’un projet et à faciliter la communication entre les parties prenantes pour aboutir à un résultat final en ligne avec les attentes initiales. Aujourd’hui, les organisations sont soumises à un cadre réglementaire qui désigne un ensemble de directives, de règles ou de normes définissant les droits des parties prenantes d’une entreprise ainsi que les conditions qu’elles doivent respecter dans l’exercice de leur activité.
Dans un cadre réglementaire de plus en plus contraignant, en quoi la comitologie demeure-t-elle incontournable malgré les nombreux écueils qu’engendre sa mise en application ?
La comitologie : décryptage d’un dispositif de gestion de projet en vogue
Qu’est-ce qu’une bonne comitologie ?
La comitologie est un dispositif qui se doit d’être organisé correctement au sein d’un projet pour pouvoir atteindre l’objectif final. Sa mise en place permet de faire la promotion de l’intelligence collective au sein d’une organisation car contrairement au format traditionnel de la gouvernance, elle permet à chaque partie prenante d’un projet d’avoir un rôle et un impact sur la qualité des livrables et a fortiori sur la conformité vis-à-vis des attentes initiales.
Quelles sont les typologies de comité ?
Les instances les plus importantes ont pour but de prendre des décisions pour faire avancer le projet et lui donner une direction.
- Le comité stratégique (COSTRAT) réunit les acteurs les plus importants afin de s’accorder sur un plan d’action pour optimiser la prise de décision collégiale vis-à-vis d’éventuels points de blocage à résoudre. En complément, le comité de Pilotage (COPIL) vise à rendre les prises de décisions plus efficaces en veillant à la cohérence et la pertinence des travaux menés au sein du projet vis-à-vis des perspectives premières, notamment en termes de dépassement de délais ou de périmètre.
- Le second type d’instance aura pour objectif de suivre l’avancée du projet de manière opérationnelle et servira à relever les indicateurs clés de l’avancée du projet ainsi que ses problématiques qui seront remontées aux instances décisionnelles, c’est notamment le cas du comité de suivi projet (COPRO) ou du comité opérationnel (COMOP).
Les bonnes pratiques d’une comitologie efficace
Une articulation fluide entre ces différents comités est essentielle pour assurer la bonne tenue de la feuille de route d’un projet. Une bonne comitologie permettra de recentrer les équipes opérationnelles sur l’objectif principal.
De plus, les échanges entre les opérationnels et les décisionnaires permettent une transversalité de l’information et donnent la possibilité de développer les solutions et les livrables les plus optimaux en maximisant la création de valeur. En ce sens et dans l’optique de tirer profit de ces avantages, l’organisation de chacun de ces comités doit répondre aux bonnes pratiques suivantes :
- La préparation en amont a pour objectif d’informer les participants de l’objet du comité via l’envoi d’un ordre du jour, les supports de présentations et la sélection avisée du choix des collaborateurs à inviter au comité.
- La gestion des discussions durant le comité consiste à orienter les échanges vers les problématiques principales et à relever les actions et décisions prises par les parties prenantes. Selon le type de comité, le chef de projet aura un rôle d’animateur ou d’acteur à part entière.
- Le suivi post-comité durant lequel la restitution des débats – rédigée sous forme de compte-rendu - doit être claire et synthétique pour permettre aux participants de mettre en place les plans d’actions et de poursuivre les échanges et les avancées lors des prochains comités.
Les écueils d’une pratique souvent utilisée à outrance
La redondance des sujets traités dans plusieurs comités
Une fois l’ensemble des bonnes pratiques énoncées, il est important de mettre en garde les chefs de projet sur les écueils de la comitologie pouvant rendre la mise en place d’un tel dispositif contre-productif et/ou complexe à implémenter.
Il faut être particulièrement vigilant quant à la fréquence des comités. L’utilisation trop abondante de comités mène souvent à des redondances dans les problématiques qui y sont traitées. Par conséquent, il y a une perte de temps qui se traduit par un coût d'opportunité car ce temps aurait pu être alloué à d’autres problématiques tout aussi impactantes.
Le manque de priorisation au sein des comités regroupant un large scope de tâches à effectuer entraîne une perte d’efficacité
De ce premier écueil découle une seconde problématique impliquée par la multiplicité des comités, à savoir la nécessité de prioriser les sujets abordés lors des comités décisionnels. En effet, l’ordre du jour d’un Comité de Pilotage est limité par le temps, il est donc primordial de traiter les sujets les plus impactants pour l’entreprise en s’aidant par exemple d’un ordre du jour qui conditionne la durée de la présentation d’un sujet au regard de sa matérialité (vis-à-vis des autres sujets présentés).
Des facteurs exogènes qui complexifient la mise en place de la comitologie
Enfin, le chef de projet pourra être confronté à des difficultés qui sont indépendantes de sa volonté. Elles peuvent émaner des parties prenantes elles-mêmes qui, par manque de temps, de volonté ou d'engagement, se refusent à participer à des comités qu’elles jugent superflus.
Par ailleurs, l’évolution permanente de l’environnement a des conséquences sur l’efficacité de la comitologie. Ainsi, l’adaptation du dispositif dans une logique de conduite du changement demeure une nécessité de premier plan pour assurer une comitologie pérenne.
Un exercice incontournable pour toute gouvernance projet au vu du contexte normatif actuel
La nécessité d’une comitologie pour assurer une gouvernance de qualité
La comitologie est le fer-de-lance d’une gouvernance cohérente, efficace et propice à mener à bien un projet avec succès. En effet, elle se portera garante d’une meilleure synergie entre les différents acteurs du projet, permettant à chacun d’avoir un rôle dans la création de valeur et l’élaboration d’une stratégie adéquate.
Un contexte normatif croissant à l’origine du succès de la comitologie
Enfin, la comitologie - ainsi que la qualité de la gouvernance qui en dépend – doit faire face à de nouveaux enjeux dans son environnement depuis la crise économique ; en particulier dans les secteurs tels que la Banque/Finance. Les exigences normatives se sont considérablement durcies, nécessitant davantage de contrôle et d’audit pour prévenir les fraudes.
De surcroît, de nombreuses normes sont apparues durant la dernière décennie, toujours dans l’optique d’assurer la sécurité collective : c’est précisément le cas dans le secteur de l’énergie avec, par exemple, le projet Flamanville 3 qui aspire à mettre en place un nouveau réacteur nucléaire. La complexité de ce type de projet justifie les difficultés auxquelles sont confrontées les personnes en charge de la mise en place d’une gouvernance et a fortiori d’une comitologie performante. En ce sens, les comités réglementaires tels que les comités d’audit prennent davantage d’ampleur pour affronter un environnement de plus en plus imprévisible et anticiper les risques qui en découlent.
La comitologie s’impose aujourd’hui comme un outil de suivi de l’avancement, d’aide à la décision et d’anticipation des risques dans un contexte où la réactivité des acteurs d’un projet face aux aléas de l’environnement est de mise. Ce dispositif s’avère donc incontournable dans le contexte normatif actuel, où la nécessité d’une gouvernance rigoureuse devient une condition sine qua non pour l’aboutissement d’un projet. En outre, nous pouvons nous demander si cette tendance à la réglementation à outrance engendrera une complexité supplémentaire pour le chef de projet qui sera davantage vulnérable et susceptible de tomber dans certains écueils. Son principal défi sera, en effet, de ne pas tomber en désuétude. L’avenir de la comitologie demeure incertain, à l’image des enjeux auxquels elle doit faire face.
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