L’IA au service de l’égalité femmes-hommes dans les médias
A l'occasion de la journée internationale des droits des femmes en mars dernier, et ce pour la 3e année consécutive, l'INA (Institut National de l'Audiovisuel), en partenariat avec l'ARCOM, l'autorité publique de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ex CSA) a publié son rapport sur la représentation des femmes dans les médias.
Pour élaborer ce rapport, l’ARCOM base son étude sur des données portant sur le temps de parole et le temps d’exposition visuelle de femmes et d’hommes dans des programmes spécifiques et des rôles précis.
Auparavant, les mesures pour obtenir ces données étaient manuelles, coûteuses et donc limitées à un échantillon de programmes trop peu représentatif. l’INA a donc utilisé l’intelligence artificielle, basée sur le taux de temps de parole uniquement.
Cette année, l’INA a utilisé une nouvelle solution, l’INAFaceAnalyzer, qui permet de mesurer le temps d’apparition des visages. Ainsi, l’analyse des résultats est plus précise sur la représentation des femmes dans les médias mais les données peuvent être encore plus précises à l’avenir avec les évolutions des intelligences artificielles.
La représentation des femmes dans les médias traditionnels en 2021
La parité n’est pas (encore) respectée
Si la part de femmes présentes à l’antenne s’est élevée à un taux encore jamais atteint jusqu’à présent, aussi bien à la télévision (45%) qu’à la radio (42%), ce n’est pas encore la parité. Et c’est à nuancer avec le temps de parole à l’antenne qui évolue peu par rapport aux chiffres de 2020 (36%, soit +1%).
Les femmes moins visibles aux heures de grandes écoutes
Ces chiffres sont d’autant plus à relativiser car l’exposition visuelle des femmes et leur temps de parole aux heures de grandes écoutes (18h00-23h00 en TV / les matinales radio), particulièrement à la télévision, est plus bas qu’au global sur toute une journée.
Les taux passent à 40% de temps d’exposition visuelle pour 34% de temps de parole sur la tranche 18h-20h. Ils baissent à 38% d’exposition pour 32% de temps de parole sur la tranche 20h-23h.
En d’autres termes, les femmes sont encore moins présentes à l’image lorsque l’audience est la plus forte.
Du côté des matinales radio, bien que n’atteignant pas encore la parité, les femmes sont présentes avec un taux de temps de parole à 43% (42% au global sur une journée).
Les chaînes d’information en continu à la traîne
Sur les chaînes d’information en continu aussi le temps d’exposition visuelle est inférieur à leur temps de parole (-5 points en moyenne).
Ces différences sont dues au fait que beaucoup de femmes journalistes sont amenées à s’exprimer dans le cadre des reportages qu’elles réalisent, sans être visibles à l’écran. Ce temps de parole n’entre donc pas dans cette étude.
Ces quelques chiffres montrent donc que le travail est à poursuivre de la part des chaînes de télévision et de radios pour atteindre la parité dans la représentation des femmes dans les médias.
Cependant, on peut s’interroger sur la qualité des données utilisées pour établir ce rapport. Par exemple, les voix off des reportages ne sont pas prises en compte. Il pourrait être aussi intéressant de prendre en compte les sujets traités et leurs rôles par les intervenants.
L’intelligence artificielle pourrait, à l’avenir, aider à répondre à ces problématiques.
Des IA encore plus précises et exhaustives à l’avenir
Le développement avance sur l’image, l’écrit et le son
Des entreprises et des laboratoires ont déjà pris ce chemin et obtiennent des résultats probants.
Par exemple, le groupe de presse suisse Ringier utilise, depuis 2019, une IA permettant d’analyser le contenu des articles publiés sur leurs sites internet. Elle évalue les images utilisées, les titres et le texte de l’article.
Des IA comme celle-ci permettent déjà de quantifier la présence des femmes dans des textes publiés dans les médias. Elles pourront aussi qualifier cette représentation notamment en identifiant les rôles attribués aux sujets (experte, citoyenne, victime ou figure d’autorité).
Enfin, l’INA travaille sur ces sujets et notamment sur l’analyse des distinctions des voix grâce à un outil basé sur le deep learning. Cela nécessite d'entraîner l’IA avec du contenu varié pour reconnaître des concepts et ainsi être plus performante. Elle permet aujourd’hui d’estimer le taux d’expression des hommes et des femmes avec une erreur inférieure à 0,6%.
Grâce aux données de l’INA, qui sauvegarde tous les flux médias de 22 chaînes TV et 21 chaînes radios françaises, il sera possible de fournir des données exhaustives fondées sur l’analyse de l’ensemble des programmes diffusés.
Des IA plus inclusives à tous les niveaux
La question de la qualité propre à l’intelligence artificielle et des résultats qu’elle peut donner se pose.
En ce sens, le Laboratoire de l’Egalité a publié en 2020, un Pacte pour une Intelligence Artificielle égalitaire entre les femmes et les hommes. Ce pacte réunit un ensemble de propositions visant à empêcher l’IA de générer des inégalités Femmes-Hommes au travail.
Ces propositions sont classées suivant 4 axes :
- Améliorer les données et les algorithmes pour permettre à l’IA de donner des résultats non-sexistes (mesurer les inégalités, équilibrer le volume des informations sur les femmes, encoder dans le script des algorithmes des objectifs égalitaires, etc.)
- Créer un environnement éthique permettant le développement d’une IA égalitaire en rendant transparentes toutes les étapes de fabrication et de fonctionnement des programmes pour identifier les dérives possibles et les corriger
- Augmenter la présence des femmes dans le secteur de l’intelligence artificielle (seulement 22% selon le Alan Turing Institute en 2021)
- Mobiliser tout le monde pour une culture de l’IA non sexiste et non discriminante avec la création d’un label “IA Equitable”
Pour conclure, bien que la représentation des femmes dans les médias traditionnels ne soit pas encore égalitaire, des efforts sont produits pour améliorer les chiffres de manière quantitative par les médias eux-mêmes, mais aussi de manière qualitative grâce à l’utilisation des nouvelles technologies.
Au-delà de la parité visuelle et auditive femme-homme, les enjeux autour de ces questions sont aussi dans l’inclusion des genres dans le secteur des médias et la qualité des informations fournies par les médias. Ces sujets sont très importants pour la lutte contre le sexisme dans notre société actuelle.
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