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Les SMR, l’avenir de l’énergie ?

Centrale nucléaire de nuit
27 juin 2022
Média et télécoms

Face à un parc nucléaire vieillissant et aux enjeux écologiques, la filière nucléaire est au cœur d’immenses investissements innovants en France. Pour de nombreux pays, l’énergie nucléaire apparaît comme une alternative incontournable aux énergies fossiles.

Ces volontés de changements et d’engagements ont été renforcées suite à la réélection de Monsieur Macron qui souhaite comme objectif premier de faire émerger en France les petits réacteurs modulaires (Small Modular Reactor, SMR, en anglais ). Ils sont en principe plus sûrs, plus rapides et moins chers à construire que les réacteurs nucléaires classiques. Mais qu’en est-il réellement ? 

Qu’est-ce qu’un petit réacteur modulaire  ? 

Par SMR, on entend une famille de réacteurs nucléaires sous forme de modules qui peuvent directement être installés sur site. Ils peuvent être simplement des versions simplifiées des réacteurs existants ou encore utiliser des technologies entièrement nouvelles. Leur point commun reste l’utilisation de la fission nucléaire (libération d’une grande quantité d’énergie suite à la division d’un noyau d’atome).

Ces Small Modular Reactor ont une puissance inférieure à 300 MW. En comparaison, les réacteurs dits “classiques” se situent entre 500 et 1650 MW. Enfin ces réacteurs modulaires peuvent être associés pour adapter leur puissance électrique afin de répondre à une demande d’électricité qui évolue constamment.

Ces petits réacteurs modulaires peuvent se transformer en systèmes multimodulaires qui permettront de coupler différents types d’énergies : le nucléaire avec d’autres sources d’énergie comme des énergies renouvelables. L’objectif étant d’obtenir une production d’électricité à bas prix et adaptable.

Actuellement, on  compte 70 projets de SMR dans le monde, selon l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Les pays comme les États-Unis, la Chine, la Russie et le Canada sont les grands pionniers du secteur. De plus petits pays, comme l’Estonie, saisissent aussi l’opportunité de cette technologie qui permet d’éviter les coûts trop importants soulevés par la construction et le maintien d’une grande centrale nucléaire. 

Pourquoi en parle-t-on de plus en plus ?

Les SMR répondent à plusieurs enjeux d’actualités :

  • Environnemental : comme producteur d’électricité décarbonée et non intermittente  ou encore pour remplacer des centrales de moyenne puissance utilisant des combustibles fossiles (par exemple les centrales à charbon aux États-Unis).
  • Accessibilité : grâce à une production d’énergie qui va pouvoir alimenter des foyers et/ou des zones industrielles dans des régions isolées.
  • Sécurité : grâce à leur taille réduite, leur autonomie et leur résilience, les SMR sont plus facilement protégés d’attaques extérieures, qu’elles soient humaines ou naturelles (catastrophes naturelles). Leurs structures permettent des contrôles plus aisés et une fabrication plus normée.
  • Économique : l’architecture modulaire du réacteur permet une augmentation de la qualité, une réduction des coûts et une optimisation des plannings des chantiers de construction.
  • Complexité : la modularité permet de diviser la centrale en un ensemble de modules dont la fonction est bien identifiée. Cela  permet d’en réduire la complexité.

Qu’en est-il de la France ?

En France, un projet de SMR baptisé « Nuward », lancé en 2019, regroupe EDF, TechnicAtome, Naval Group, Framatome et le CEA (Commissariat à l’Energie Atomique). Il doit permettre la construction d'un prototype de SMR en France à l'horizon 2030, qui devrait ensuite servir de démonstrateur à l'export. Ce projet a pris de l’ampleur suite au plan de relance France 2030 présenté par Emmanuel Macron fin d’année dernière qui prévoit un investissement d’un milliard d’euros consacré au développement des SMR. 

Plus largement, afin de répondre aux objectifs de décarbonation d’ici 2050, il est essentiel pour la France de conserver sa part de nucléaire. En effet, c’est une énergie qui émet très peu d’émission carbone. Le développement des SMR est donc primordial afin de répondre aux enjeux futurs. Enfin, la France a une position de leader européen dans le domaine du nucléaire. Pour conserver cette place et rester compétitive, le rôle des SMR sera clé.

Les limites des SMR

Tout porte à croire que les SMR sont l’avenir du nucléaire: moins cher, plus sûr et plus écologique que ses prédécesseurs. Ce constat est tout de même à nuancer.

La fabrication de ces réacteurs nécessite un investissement initial important pour pouvoir les industrialiser et les produire en série. C’est cette production en série qui permet en grande partie d’obtenir des coûts intéressants. A date, aucune commande à l'international de SMR n’a été faite. 18 pays ont des projets de SMR en cours et seulement 5 pays ne développant pas de SMR souhaitent s’en équiper. Il faudra uniformiser les normes internationales de sûreté pour permettre d’amorcer ce nouveau marché. Des échanges avec l’agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) sont actuellement en cours sur le sujet.

carte du monde des normes du nucléaire
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La France va devoir s’imposer devant des puissances telles que la Russie et la Chine qui sont plus matures sur le sujet pour pouvoir exporter massivement ses SMR. Pour l’instant, seule la Russie possède deux SMR en service sur un navire dans la région très isolée de la Tchoukotka. A cela s'ajoutent les délais longs pour obtenir la certification et produire ces réacteurs.  Le premier réacteur SMR français ne devrait pas voir le jour avant 2030.

Sur la question de la sûreté, la multiplicité des installations augmente le nombre de réacteurs susceptibles de subir un accident.  Cela pourrait également conduire à un besoin accru de personnels qualifiés alourdissant ainsi davantage les coûts de ces petits réacteurs modulaires.

Sur le volet écologique, une étude parue dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences montre que les SMR peuvent produire jusqu'à 30 fois plus de déchets radioactifs que les réacteurs classiques par unité d'électricité générée.

Les SMR permettent de répondre à beaucoup d’enjeux clés grâce à leur technologie et leur structure : environnementaux, sécuritaires, économiques, etc… Cependant, ils demandent un investissement initial conséquent. Le risque lié au nucléaire reste non nul. Enfin la question environnementale est aussi à prendre en compte à cause des déchets radioactifs produits. 

Pour répondre au mieux aux enjeux futurs, ces petits réacteurs modulaires ne peuvent être la seule solution d’avenir. Ils devront forcément être combinés aux centrales actuelles, à un usage croissant d’énergie renouvelable et une sobriété énergétique.

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Emmylou ROSZAK
Emmylou ROSZAK
Senior Partner - Directrice de l'Offre Energies & Utilities

La transformation numérique prend de plus en plus de place dans les métiers des acteurs de l’Énergie & Utilities. mc2i apporte conseil et savoir-faire pour accompagner efficacement les acteurs de ce secteur.

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Jean-Christophe Verckens
Senior Partner - Directeur de l'Offre Energies & Utilities

Forts de nos multiples expériences, nous répondons efficacement aux besoins grandissant de nos clients de l'Energie et des Utilities en apportant une convergence entre le Métier et les Systèmes d’Information.

Auteur Amutha DHARMALINGAM
Amutha DHARMALINGAM
Consultante
Maeva FOUNDOUSSOU
Consultante confirmée