Crise ou mutation ? Quelles sont les perspectives du marché du gaz en 2025 ?

Tensions géopolitiques actuelles, nouvelles réglementations du marché gazier en France : État des lieux du marché du gaz

Le conflit russo - ukrainien a des impacts directs sur l’importation de gaz en Europe. Cette situation a fait fortement augmenter les prix du gaz à l'échelle européenne. Néanmoins, en France, cette hausse a été réduite pour plusieurs raisons. Tout d’abord, la Russie n’est pas le premier exportateur de gaz : la Norvège exporte 36 % de son gaz en France et dans le même temps, la France a pu profiter d’un bouclier énergétique sur les prix du gaz.

En parallèle, ces dernières années, la réglementation du marché a changé. Le 1ᵉʳ juillet 2023, les tarifs réglementés de vente (TRV) du gaz ont été supprimés, conformément à la loi Énergie-Climat de 2019. De plus, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) publie désormais des prix repères mensuels pour guider les consommateurs dans le choix de leur fournisseur.

Dans ce contexte, les indicateurs disponibles à date montrent que la tendance de baisse de consommation de gaz s’est  poursuivie. À titre d’exemple, on constate une baisse de - 22,5 % de consommation de gaz en 2024, par rapport à 2019 alors que les prix du gaz entre 2023 à 2024 ont augmenté de 5 % à 10 %.

Quelle évolution pressentie du prix du gaz en 2025 ?

De nombreux facteurs géopolitiques, climatiques et économiques influencent cette évolution. L'hiver 2024-2025, globalement plus doux que d’habitude, a contribué à stabiliser les prix en réduisant les besoins en chauffage, bien que certaines régions aient connu des périodes de froid plus marquées, entraînant ponctuellement une hausse de la demande.

Le stockage de gaz de l’Union Européenne (UE) joue un rôle clé dans la fixation des prix. Les données disponibles au début de 2025 montrent une diminution des stocks de gaz au sein de l'UE, avec un taux de remplissage moyen de 58,5 %, contre 74 % à la même période en 2024. En France, la situation est similaire, avec des stocks remplis à 55%, en baisse par rapport aux 75 % enregistrés début 2024. Pour garantir la sécurité d'approvisionnement, la Commission Européenne a fixé un objectif de remplir les stocks à 90 % d’ici novembre 2025.

Par ailleurs, la fin du transit du gaz russe via l'Ukraine aggrave les préoccupations sur la sécurité énergétique en Europe :

• Malgré les sanctions, l’UE reste dépendante des hydrocarbures russes.
• L’UE a versé 22 milliards d’euros à la Russie pour ces importations, plus que l’aide apportée à l’Ukraine (19 milliards d’euros).

Malgré les sanctions et les efforts pour diversifier les sources d'énergie, l'Union européenne reste dépendante des hydrocarbures russes par :

• L’utilisation de pétroliers russes "fantômes".
• Le raffinage d’hydrocarbures russes dans des pays tiers (Inde, Turquie).
• L’augmentation des importations de gaz naturel liquéfié (GNL) russe, non encore sanctionné.

De plus, les cours pétroliers continuent d’influencer le marché du gaz. En janvier 2025, une hausse de 8,6 % des prix du pétrole en un mois a entraîné une augmentation de 7 % des prix du gaz. Cela est dû à la structure de certains contrats de fourniture de gaz encore liés aux prix du pétrole, bien que cette corrélation tende à s’affaiblir avec la diversification des sources d’approvisionnement.

La route vers la décarbonation

Avec la hausse des prix du gaz, l'électricité séduit de plus en plus, malgré un coût plus élevé par kWh. Son adoption, essentielle à la décarbonation, reste freinée par son prix, accentuant le risque d’inégalités énergétiques.

Le biométhane apparaît comme une alternative viable, s’intégrant aux infrastructures existantes et facilitant une transition progressive vers une électricité plus verte. Toutefois, sans mécanismes de soutien, l’augmentation du coût de l’électricité pourrait exclure les ménages les plus fragiles. Une transition énergétique réussie doit donc être inclusive et garantir un accès équitable aux énergies renouvelables.

En parallèle, le gaz fossile voit son avenir incertain face à l’essor des énergies propres, mais le développement du biogaz lui offre une perspective de durabilité. GRDF vise ainsi 20 % de gaz vert injecté dans son réseau, preuve d’une volonté d’adaptation.

L’enjeu principal reste de concilier décarbonation et accessibilité énergétique. Sans politiques d’accompagnement efficaces, la transition pourrait creuser les inégalités et freiner son acceptation. Une stratégie équilibrée, combinant énergies renouvelables et solutions intermédiaires comme le biogaz, semble essentielle pour assurer une transition énergétique viable et équitable.