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La fusion nucléaire : une réponse aux enjeux climatiques ?

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Energie
14 octobre 2023

La fusion nucléaire est un sujet repris dans beaucoup de fictions. Source d’énergie immense, infinie et propre, ces mythes sont aujourd’hui au cœur des travaux des meilleurs scientifiques de notre société. Concrètement, de quoi parle-t-on ?

Rappel sur le principe physique de fusion nucléaire

Pour bien comprendre la fusion nucléaire, il faut la comparer au procédé actuel de production d’énergie dans notre centrale nucléaire : la fission.

Le principe de la fission est de “casser” un gros noyau d’atome en deux plus petits. Cette séparation engendre une grande production de chaleur et la possibilité de recommencer le processus. Ainsi, le procédé de fission nucléaire a pu être industrialisé à partir de 1950, en récupérant cette chaleur pour produire de l'électricité.

En ce qui concerne la fusion, le principe est inverse et consiste à “assembler” deux petits noyaux atomiques et former un noyau plus lourd. Cette technologie est étudiée depuis 50 ans dans l’optique de maîtriser son industrialisation, c'est-à-dire de produire plus d’électricité qu’il n’en faut pour amorcer la réaction.

Dans la plupart des projets actuels, la réaction de fusion nucléaire étudiée est celle du Deutérium et du Tritium pour former de l’hélium.

La fusion nucléaire se distingue de la fission par quelques avantages : 

  • Les déchets qui seront produits par cette réaction ne seront pas des déchets radioactifs de haute activité à vie longue, c'est-à-dire qu’ils seront plus rapidement traités et recyclés.
  • La réaction de fusion est très difficile à obtenir et à maintenir. Ainsi, contrairement à la réaction de fission, il n’y a pas de réaction en chaîne pouvant provoquer un accident nucléaire.

Les différentes technologies de fusion

Il existe actuellement deux méthodes majeures permettant de réaliser une fusion nucléaire : le confinement inertiel et le confinement magnétique. Voici en quoi elles consistent et ce qui les distingue :

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Consommation de produits pétroliers raffinés par secteur, SDS Bilan énergétique de la France (2020)
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Les avancées technologiques

Pour le confinement magnétique, ITER, un réacteur expérimental, est en cours de construction à Cadarache, en France. Avec une date de premier plasma prévue pour 2025, mais qui sera sans aucun doute retardée dû à la crise COVID et à la présence de microfissures sur l’un des neuf segments composant le tokamak, ITER a pour but est de démontrer la possibilité scientifique et technologique de la production d'énergie par la fusion.

Malgré une situation géopolitique complexe, notamment concernant l’Ukraine et la Russie, le projet ne ralentit pas. Le 1er novembre 2022, la Russie a envoyé vers la France l’une des six bobines destinées à maintenir le champ magnétique au sein du tokamak.

Concernant le confinement inertiel, plusieurs démonstrateurs sont construits dans le monde, dont le laser Mégajoule, en France. Par ailleurs, le laboratoire américain NIF, avec des premières avancées au printemps 2021, a renouvelé un exploit scientifique en décembre 2022 après avoir réalisé un tir à rendement positif, c'est-à-dire qu’ils ont réussi à produire plus d’électricité que la quantité nécessaire pour amorcer la réaction. Cependant, de nombreuses améliorations sont encore nécessaires pour atteindre une industrialisation de cette technologie.

Quel est concrètement la valeur ajoutée qu’apporte la fusion ?

La fusion nucléaire comme présentée dans cet article est une source de production d’électricité. Nous avons vu qu’à l’instar des techniques de production actuelles pour l’électricité nucléaire, la production d'électricité par fusion présente des avantages similaires : pilotable, propre… Mais apporte également une plus-value : renouvelable, productivité, faible radioactivité, moins accidentogène…  Sur le papier donc, la fusion nucléaire est la candidate idéale pour prendre le relais sur la fission et constitue également une réponse intéressante au défi climatique.  

Vous avez dit défi climatique ? 

En quoi ça consiste ? Pour vulgariser le sujet, prenons les éléments faisant consensus : le réchauffement climatique est d’origine humaine et est en majorité causé par les émissions (“artificielle”) de gaz à effet de serre dans cet ordre : CO2 (76%), CH4 (16%), et N2O (6%) (GIEC, 2014). Ce réchauffement présente un défi, car ses conséquences ne sont pas à prendre à la légère : augmentation en intensité et fréquence des évènements météorologiques extrêmes, élévation du niveau de la mer… 

Mais alors, à quel enjeu répond la fusion ? La production d’électricité est responsable de plus d’un tiers des émissions de CO2 à l’échelle de la planète; la production d’électricité est le premier vecteur d’émissions carbones. Il est donc important d’y apporter une réponse. Dorénavant, il convient d’établir si la réponse que la fusion peut apporter sera suffisamment rapide.

Deux éléments vont nous aider dans notre tentative de réponse : définir ensemble ce que l’on entend par urgence climatique et l’horizon de réponse que porte la fusion nucléaire.

Selon les trajectoires de réchauffement de la planète  (+1,5°C, +2°C, +3°C, etc), les réponses à apporter sont différentes et de plus en plus radicale à mesure que la température s’élève. Sachant que les 1,1°C sont d’ores et déjà franchis, il apparaît de plus en plus important de limiter nos émissions et de les limiter rapidement. 

Sachant que la durée de construction d’une centrale à fission (en général des réacteurs de type PWR) est en moyenne dans le monde de 10 ans, alors la promesse que représente le nucléaire apparaît (trop ?) distante. La fusion qui de surcroît est une technologie encore non maîtrisée, aurait des délais de construction similaires (si l’on se base sur les temps de construction d’ITER et consorts), cette solution n’est donc qu’un espoir lointain.

La fusion, pour répondre à l’urgence climatique, n’est en somme pas une réponse adéquate. En revanche, dans un horizon de plus long terme, la question peut encore se poser pour des raisons évoquées plus haut : haute productivité énergétique, peu voire pas de déchets, énergie propre, etc. Dans cette optique, les équipes de recherche ne relâchent pas leurs efforts, bien au contraire; les expériences vont bon train et les essais récents aux Etats-Unis paraissent prometteurs…

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Emmylou ROSZAK
Emmylou ROSZAK
Senior Partner - Directrice de l'Offre Energies & Utilities

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