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TURPE 7 bonne ou mauvaise nouvelle pour les portefeuilles des Français ?

Energie
17 décembre 2025

Marqué par une hausse immédiate des tarifs d'acheminement (7,7%), le nouveau TURPE 7 (2025-2028) est présenté comme un effort collectif incontournable pour financer les investissements colossaux (électrification, énergies renouvelables et résilience climatique) nécessaires à la modernisation du réseau électrique français, soulevant la question de son impact réel sur le portefeuille des Français

Le TURPE (Tarif d’Utilisation des Réseaux Publics d’Electricité) est un tarif réglementé couvrant les coûts d’utilisation des réseaux publics d’électricité en matière de transport et de distribution. Fixé par la CRE, il représente entre 20% et 40% de la facture finale, et sa hausse se répercute directement sur le portefeuille des ménages. 

Le TURPE 7 est entré en vigueur le 1er août 2025, et encadre la tarification de l’acheminement de l’électricité pour la période 2025-2028. Son objectif : donner aux gestionnaires de réseaux les moyens de répondre à trois défis majeurs :

  • l’électrification des usages, 
  • l’essor des énergies renouvelables et 
  • le renforcement de la résilience du réseau face au climat.

Pour faire face à de tels enjeux, des investissements conséquents seront nécessaires pour accompagner cette transformation, soulevant ainsi une question centrale : le TURPE 7 est-il une bonne ou mauvaise nouvelle pour le portefeuille des Français ?

Une hausse des tarifs d'acheminement

Les nouveaux termes tarifaires sont entrés en vigueur dès le 1er février 2025, soit six mois avant l’échéance initiale,  avec une hausse de 7,7%  dont 9,6% pour le TURPE Transport. 
Cette augmentation anticipée s’explique dans un premier temps par la nécessité de combler les écarts financiers accumulés sous l’ancien tarif TURPE 6. 
En effet, les prévisions estimées n’ont pas concordé à la réalité des dépenses (consommation plus faible que prévue, donc moins de recettes du TURPE), entraînant un déficit devant être compensé par le TURPE 7.

Dans un second temps, l’entrée en vigueur anticipée du TURPE 7 permet de financer les dépenses prévues pour la nouvelle période (2025-2028) et de répondre à la hausse des dépenses d’investissement par les gestionnaires de réseaux. 

La hausse du  TURPE 7 doit permettre à RTE et Enedis d’accompagner et faciliter l'électrification croissante des usages. Les montants annoncés sont considérables :

  • RTE prévoit de tripler ses investissements, passant de 2,1 milliards d’euros en 2023 à 6,2 milliards d’euros en 2028.
  • Enedis ambitionne quant à lui d’augmenter de 40 % ses prévisions d’investissement pour atteindre 7 milliards d’euros en 2028.

Ces investissements sont malgré tout indispensables et permettent le développement de nouvelles infrastructures, l’amélioration des technologies de transport et de distribution et l’intégration des nouvelles capacités de production renouvelable.

Le TURPE 7 ajuste également les conditions de rémunération des gestionnaires de réseaux afin de garantir une rémunération équitable des investissements réalisés.
Une prime spécifique de 0,5 % a notamment été introduite pour le raccordement des parcs éoliens en mer en raison de leur complexité et de leurs risques accrus.

Autre évolution : depuis le 1er août 2025, le FACE (fonds destiné à financer l’électrification rurale) n’est plus financé par le TURPE mais par le budget de l’Etat, entraînant une diminution de -1,92 % du TURPE Distribution. Cette baisse est compensée par la hausse équivalente des taxes, donc cela n'entraînera aucune diminution de la facture finale du consommateur.

Derrière ces chiffres, un constat s’impose : le TURPE va peser sur le budget des ménages. La hausse des coûts d'acheminement s’ajoute à une facture déjà alourdie par la volatilité des prix de marché et des taxes énergétiques. Cependant, il est nécessaire de comprendre plus en détail les enjeux qui se cachent derrière cette hausse.

Oui, mais comment expliquer cette hausse ?

Le TURPE 7 doit accompagner la montée en puissance de la consommation électrique liée à l’électrification des usages : développement des véhicules électriques, pompes à chaleur, électrification industrielle, etc. Cette évolution implique un réseau capable de gérer des volumes d’énergie plus importants et des profils de consommation plus variables. Le tarif doit donc financer le renforcement et la modernisation des infrastructures tout en encourageant des comportements vertueux via un signal prix adapté (périodes de pointe, flexibilité).  Des exigences du TURPE 6 ont été reconduites, mais d’autres sont apparues.  

Tout d’abord, comme lors du TURPE 6, la forte intégration des énergies renouvelables, notamment décentralisées (solaire, éolien, autoconsommation), transforme profondément le fonctionnement des réseaux. Le TURPE 7 doit financer le raccordement de nouvelles capacités de production et l’adaptation des réseaux à des flux bidirectionnels. Il doit aussi soutenir le développement des solutions de pilotage et de flexibilité nécessaires pour équilibrer l’intermittence des ENR. L’enjeu est d’assurer un accès non discriminatoire au réseau tout en maintenant sa stabilité et sa sécurité face à ces nouvelles injections.

Par ailleurs, les infrastructures électriques sont de plus en plus exposées aux aléas climatiques (tempêtes, sécheresses, vagues de chaleur), ce qui accroît les risques de pannes et de coupures. Le TURPE 7 intègre donc la nécessité de renforcer la résilience du réseau : enfouissement de lignes, modernisation des postes électriques, dispositifs de surveillance et de réparation rapides. Ces investissements doivent être planifiés sur le long terme pour anticiper l’intensification des phénomènes climatiques extrêmes et éviter une dégradation de la qualité de service.


Mais comme évoqué, le TURPE 7 introduit de nouvelles  réformes notables comme la répartition des heures creuses : celles-ci seront désormais réparties entre la nuit et l’après-midi – notamment en été – pour profiter de la production photovoltaïque abondante l’après-midi. 

De plus, les clients non équipés d’un compteur communicant (Linky) supporteront désormais un surcoût : à compter du 1er août 2025, une redevance fixe de 6,48 € tous les deux mois sera appliquée. Une majoration de 4,14 € tous les deux mois pourra s’ajouter si ces utilisateurs n’effectuent pas de relève ou de rendez-vous pour la relève.

Le TURPE 7 propose une nouvelle option tarifaire, transitoire, destinée aux sites capables d'injection et de soutirage (notamment avec stockage). Cette option vise à dynamiser la flexibilité : ces sites seront incités à injecter dans le réseau lors des pics de consommation locale, et à soutirer ou limiter leurs injections lors de surproduction.

Pour répondre à tous ces défis – électrification, ENR, résilience, etc – les besoins d’investissement des gestionnaires de réseau (RTE, Enedis, régies locales) sont en forte croissance. Le TURPE 7 doit permettre de financer ces dépenses tout en préservant l’acceptabilité économique pour les consommateurs. L’enjeu est de trouver un équilibre entre un tarif suffisamment élevé pour garantir les ressources nécessaires et une trajectoire de hausse maîtrisée, afin de ne pas fragiliser les ménages et les entreprises dans un contexte déjà marqué par des tensions sur les prix de l’énergie.

Le TURPE 7 aura un impact sur le portefeuille des Français

Comme nous l’avons vu dans les parties précédentes, il est demandé aux acteurs du secteur d'adapter davantage le réseau pour répondre aux enjeux de demain. Les gestionnaires de réseau comme Enedis doivent financer d’importants investissements pour adapter le réseau à l’électrification des usages (mobilité, renouvelables, stockage, etc.), ce qui accroît les charges à couvrir. Ces coûts sont répercutés, en partie, dans le TURPE, ce qui augmente la composante réseau / acheminement sur la facture d’électricité. Même si certaines hausses sont compensées ou amorties, notamment par des taxes ou par des transferts de charges (ex : suppression du FACÉ pour alléger le TURPE), l’effet net est que les ménages voient leur facture d’électricité globalement augmenter.

Cette hausse des factures électriques se traduit directement ou indirectement par une perte de pouvoir d’achat. En effet, l’électricité est une dépense de base : quand le coût de l’électricité augmente, cela réduit la part du budget que les ménages peuvent consacrer à d’autres postes (alimentation, logement, transport, loisirs). De plus, les effets peuvent être multiplicateurs : des entreprises industrielles ou de services subissant ces coûts élevés peuvent les répercuter sur les prix des biens et services, ce qui provoque une inflation plus large. Par ailleurs, les ménages les plus modestes ou ayant un usage élevé de l’éclairage, du chauffage ou de l’électroménager sont particulièrement affectés, car ces hausses pèsent davantage sur leur budget global. Ces effets combinés font que le pouvoir d’achat – la capacité des ménages à acheter des biens et services avec leurs revenus – peut diminuer quand le TURPE augmente. Mais pourquoi les Français devraient-ils faire ces efforts ?

Le TURPE 7 représente une charge supplémentaire sur la facture des Français, mais il s’agit avant tout d’un investissement collectif pour l’avenir. En augmentant les ressources allouées au réseau, la CRE ne se contente pas de financer son entretien, elle prépare le système électrique français à relever les défis de demain.
Trois leviers principaux illustrent cette logique :

  • Accélérer les raccordements : en incitant RTE et Enedis à réduire les délais de raccordement afin de soutenir l’électrification et l’intégration rapide des énergies renouvelables. Cela permettra à la France de progresser vers la neutralité carbone et de réduire la dépendance aux énergies fossiles.
  • Optimiser les coûts des investissements : les gestionnaires sont incités à investir plus efficacement, afin que les dépenses engagées aujourd’hui se traduisent par des économies demain, pour le système comme pour les consommateurs.
  • Développer des solutions de flexibilité : le besoin croissant d’électrification ne doit plus seulement passer par le renforcement du réseau, mais aussi par l’adaptation de solutions plus intelligentes et souvent moins coûteuses. Ces alternatives limitent les dépenses futures et garantissent un système plus stable et résilient.

Ainsi, si le TURPE 7 entraîne une hausse immédiate de la facture, il constitue une assurance pour l’avenir en permettant la construction d’un réseau robuste face au changement climatique, une meilleure intégration d’énergie décarbonée et une consommation plus flexible.
Le TURPE 7 répond au pari suivant : investir dès aujourd’hui, pour alléger les factures de demain, en construisant un réseau électrique durable, performant et au service des consommateurs.

En définitive, le TURPE 7 marque un tournant : il renchérit immédiatement la facture d’électricité des ménages, mais il s’agit d’un passage obligé pour relever les défis de l’électrification, de l’intégration massive des énergies renouvelables et du changement climatique. Derrière la hausse, l’objectif est clair : donner à nos réseaux les moyens de rester fiables, résilients et adaptés à la transition énergétique. C’est donc un effort collectif, coûteux à court terme, mais essentiel pour préparer un système électrique plus robuste et durable.

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Emmylou ROSZAK
Emmylou ROSZAK
Senior Partner - Directrice de l'Offre Energies & Utilities

Dans un contexte de transformation énergétique et réglementaire, les acteurs du secteur font face à de nombreux bouleversements, l’occasion de réinventer les modèles du secteur. Nous accompagnons nos clients dans leurs transformations numériques et dans leurs problématiques métiers pour en faire des leviers de performance, tout en alignant innovation et réalité opérationnelle.

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Jean-Christophe Verckens
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Auteur Lisa RAMALHOSA
Lisa RAMALHOSA
Consultante
Auteur Marouane Turki
Marouane Turki
Consultant confirmé