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OKR, un framework poussant au dépassement

26 mai 2021
Systèmes d'information

OKR, littéralement Objectives and Key Results est un framework utilisé par de nombreuses entreprises de la tech, notamment Google, Spotify et Twitter, permettant de se créer et fixer des objectifs.

Ce framework vise à encourager l’alignement dans une organisation et à pousser les collaborateurs à se fixer des objectifs ambitieux, “étirés” comme qualifiés par Andy Grove, à l’origine de cette méthode.

Impliquant tous les niveaux d’une organisation, les OKR ont pour vocation de faire progresser tout en motivant les employés, à travers une politique de transparence totale et d’implication bottom-up.

Les objectifs soulignent des buts larges, visant à propulser une organisation vers une direction souhaitée et définie. Ils sont supportés par un ou plusieurs Key Results, qui permettent de mesurer leur niveau d’atteinte.

Pour résumer, les objectifs sont qualitatifs tandis que les Key Results sont quantitatifs.

OKR, un framework inspiré par plusieurs modèles

Les OKR sont dérivés de plusieurs méthodologies de définition et suivis d’objectifs:

  • Le management par objectifs (MBO, Management By Objectives) de Peter Drucker. Cette approche vise à améliorer la performance d’une organisation en définissant clairement des objectifs validés à la fois par le management et par les employés. Drucker croyait fermement qu’en s’assurant que les employés étaient impliqués dans cette définition, cela entraînerait une meilleure participation et un engagement renforcé de leur part, ainsi que l’alignement des objectifs au sein de l’organisation.
  • SMART, défini en 1981 par George T. Doran. Cet acronyme (Spécifique, Mesurable, Atteignable, Réaliste, Temporellement Défini) permet de simplifier et rationaliser la méthodologie de détermination d’objectifs. La simplicité de cette méthode a permis la généralisation de son utilisation au sein des organisations ainsi qu’une amélioration de la qualité des objectifs, qui étaient ainsi temporellement définis et supportés par des KPIs mesurables. Cette approche basée sur les résultats est un pilier majeur du modèle OKR.
  • Le tableau de bord prospectif (Balanced Scorecard - BSC) a été développé par Robert Kaplan et David Norton. Son but était de confronter le modèle fixé par les entreprises, qui se concentrent le plus souvent sur les succès financiers à court terme. Le tableau de bord prospectif a ainsi introduit des mesures non-financières mais tout autant stratégiques dans les objectifs afin de permettre un positionnement tourné vers les succès à long-terme.

Le framework OKR a ainsi été développé par Andy Grove, lorsqu’il était le CEO d’Intel. Reconnaissant l’importance de l’alignement à la fois des employés et du management dans la définition des objectifs (MBO) et de KPIs pour les mesurer (SMART) ; Grove les a fusionnés, créant ainsi OKR.

Sa position: un management basé sur les objectifs doit simplement répondre à deux questions: où est-ce que je veux aller (objectif) ; et comment vais-je m’auto-contrôler pour voir si j’y arrive (le résultat clé, Key Result).

Grove a également décliné le modèle MBO de Drucker en deux autres aspects:

  • Augmenter la fréquence de fixation des objectifs et Key Results - les ramener au trimestre ou au mois afin de s’adapter au rythme rapide des industries modernes.
  • Ne pas intégrer l’OKR dans les contrats ou objectifs des employés. Ils sont effectivement abordés lors des revues de performance, mais seulement en tant qu’inputs. Cela permet de créer des objectifs ambitieux (parfois non atteignables) mais sans donner aux employés l’impression qu’ils seront lésés lors des revues de performance.
     

OKR : Zoom sur les notions d’Objectifs et Key Results

Selon Grove, la notion d’étirement est extrêmement importante dans le framework OKR:  “Les objectifs doivent être fixés si hauts que même si l’individu se donne à son maximum, il aura seulement 50% de chances de les atteindre. Le résultat est meilleur lorsque chacun cherche à atteindre un niveau au-delà de ses capacités immédiates, même si cela signifie échouer la moitié du temps. Ce type d’objectif est essentiel si ce que vous recherchez est une performance optimale de votre part et celle de vos employés”.

Dans OKR, un Objectif est une déclaration qualitative qui établit un but pour une période définie, généralement un trimestre. Le framework encourage d’en fixer entre 1 à 3, qui devront être: inspirants, atteignables, contrôlables, et propulser le business pour atteindre sa stratégie.

Les Key Results, eux, sont utilisés afin de mesurer le progrès vers nos objectifs. Ils sont quantitatifs et  doivent être  :

  • Ambitieux : il s’agit-là de l’aspect qui différencie les OKR des autres formes plus traditionnelles d’objectifs, et qui défend la notion d’étirement. Le principe appliqué est le suivant: si vous vous fixez l’objectif d’améliorer vos ventes de 5% et que vous pensez pouvoir l’atteindre facilement, vous devriez vous fixer une cible de 10%. Au fur et à mesure du trimestre, vous pouvez vérifier votre performance, tout en vous challengeant à atteindre votre cible. L’idée est que si vous n’atteignez “que” 7%, vous aurez réalisé moins que l’OKR mais 2% de plus que votre objectif initial, grâce à la cible “étirée”.
  • SMART
  • Progressistes : Voir son propre progrès est un grand facteur de motivation et pousse les équipes à atteindre leurs OKRs.
  • Mesurables : ils doivent être facilement évaluables avec un nombre. Le système de notation le plus répandu (notamment chez Google) est de 0 à 1. En principe, si une personne atteint toujours le “1”, alors son OKR n’est pas assez ambitieux: la moyenne d’atteinte est entre 0,6 et 0,7.
  • Publics : tout le monde au sein de votre organisation doit pouvoir savoir et voir ce sur quoi les autres travaillent et quelle est leur performance. Chez Google par exemple, les OKRs de chaque employé, quel que soit son niveau hiérarchique, sont disponibles sur l’intranet.

Pour autant, les OKRs ne sont pas à opposer aux KPIs (Key Performance Indicators), mais à utiliser en complément de ces derniers. Les KPIs sont généralement définis en identifiant des métriques vitales au succès d’une entreprise. Si la performance dévie du résultat attendu, le KPI alerte le business de cette variation et lui permet de mettre en place des mesures si besoin. Les KPIs sont donc appropriés pour suivre des métriques, mais pas pour se fixer des objectifs et les suivre.

En comparaison, OKR est tourné vers le changement, vers le fait de définir des objectifs étirés qui changent les comportements, systèmes, processus et cultures au sein d’une organisation.

L’application d’OKR dans un contexte de gestion de projet ou de portefeuilles

L'approche OKR permet, appliquée à un portefeuille d’activités, d’augmenter les niveaux d’alignement, focus et de suivi de ces activités.

La définition des OKR niveau portefeuille passe donc avant la définition des OKR individuels de chaque projet, en définissant 3 à 5 OKR par portefeuille, pas plus, sans quoi vous risquez de trop vous éparpiller.

Les Key Results doivent être étirés et inspirants, afin d’éviter les écueils en termes d’incentive: augmenter le volume des ventes est facile s’il n’y a pas de cible équivalente s’assurant que ces ventes génèrent du profit.

Une fois que cela est fait, il convient de définir les OKR projets, tâche qui sera laissée aux équipes. Il conviendra d’effectuer des exercices d’alignement horizontal et vertical entre les équipes, tout en continuant de se référer aux OKR du portefeuille. Cette manière de travailler permet d’éviter le travail en silo des équipes, ainsi qu’une meilleure priorisation des objectifs et tâches entre les différentes équipes.

OKR, une implémentation facile ?

Selon John Doerr, qui a introduit le framework OKR au sein de Google, l’implémentation des OKR à l’échelle de toute une entreprise nécessite  plusieurs facteurs clés de succès.

Le premier est une forte implication autour de la définition et poursuite de ces objectifs, à tous les niveaux: du CEO, de l’équipe de management, et de chaque collaborateur.

Le second concerne l’identification d’un “guide” OKR qui pourra former les équipes, les accompagner dans chaque étape de définition des Objectifs et Key Results.

Enfin, les entreprises doivent intégrer l’OKR dans leur ADN, culture de tous les jours et langage. La visibilité des OKR (par tous et de tous) doit être assurée, et chaque nouvel arrivant devra être formé à ce fonctionnement, afin de sécuriser le succès et l’adoption de ce framework. La possibilité d’ avoir accès aux OKRs de chaque personne au sein d’une organisation et de leur progression permet de réellement lier son activité directement aux buts de l’entreprise, et de se donner une meilleure emprise dessus.

Avec ces outils, l’adoption et le bon fonctionnement d’OKR peut prendre jusqu’à 2 trimestres, et nécessite un appui constant du management, ainsi qu’une forte conduite du changement pour amener tous les collaborateurs à assimiler et automatiser ce mode de fonctionnement.

En conclusion, OKR est un framework qui a fait ses preuves, et qui, tout en poussant les équipes à se surpasser, leur donne une réelle visibilité sur leur entreprise, ainsi que le sentiment d’être intégré dans la vision globale et à long terme de cette dernière.

Selon les témoignages d’employés d’Intel ou Google, la plus grande contrainte de ce framework est sa mise en place et notamment le processus de changement de mentalité des collaborateurs.

En effet, ayant parfois été dans le passé victimes de pénalités s’ils n’atteignaient pas leurs objectifs, certains pourraient avoir des difficultés à appréhender ce fonctionnement qui leur ‘impose’ de se fixer des objectifs inatteignables.

Ceci souligne d’une part l’importance de la conduite du changement et du support de tout le management dans la mise en place de ce framework mais également le fait que de par la volonté des employés d’atteindre malgré tout ces objectifs “inatteignables”, l’innovation et la créativité seront d’autant plus encouragées dans les entreprises appliquant l’OKR. Allant de l’automatisation des tâches (RPA) à l’optimisation des tâches ou processus, l'adoption du lean management, ou encore de solutions IA, tout sera fait pour repousser à chaque fois les objectifs.

Laura CARNEIRO
Project Manager