L’impact de la crise sanitaire sur les habitudes de consommation et d’investissement

La Covid-19 a déclenché une crise sanitaire sans précédent impactant toutes les couches de notre société. Dans cet article nous observerons l’impact du virus sur les habitudes de consommation énergétique des Français qu’ils soient particuliers ou entreprise ainsi que sur les prévisions d’investissements.
Quel a été l’impact du confinement sur la consommation des particuliers ?
Avant la crise sanitaire de 2020, la consommation électrique des français était plutôt stable avec une légère tendance baissière d’une année à l’autre ce depuis plusieurs années maintenant grâce aux progrès en matière d’efficacité énergétique. Le gestionnaire de réseau RTE affirme qu’au bout de deux semaines de confinement, une baisse globale de la consommation de 15% à 20% a été observée en semaine contre 10% le week-end, en comparant une situation météorologique équivalente hors confinement.
L’entreprise Enedis, chargée de la gestion de la distribution d'électricité, s'est penchée sur la question et a observé au mois d’Août une baisse de la consommation en énergie de 11,3% sur l’ensemble de son réseau qui s’explique directement par le confinement. La consommation énergétique des particuliers a chuté de 4% par rapport à la consommation normale, malgré la généralisation du télétravail.
Ce tableau illustre les différences de consommation énergétique de professionnels pendant le confinement 2020 puis lors du déconfinement par rapport à une consommation nominale.
Artisans / Restaurateurs |
Grandes / Très grandes entreprises |
Confinement : consommation en baisse de 24% par rapport à une consommation nominale. | Confinement : consommation en baisse de 22% par rapport à une consommation nominale. |
Déconfinement : consommation en baisse de 12% par rapport à une consommation nominale. | Déconfinement : consommation en baisse de 14% par rapport à une consommation nominale. |
La baisse globale observée sur le réseau est donc principalement due à la baisse de la consommation des entreprises.
Dans le reste du monde, l’Agence Internationale de l’Energie a observé au 1er trimestre une baisse de la consommation d’énergie primaire de 3,8% par rapport à l’année précédente. Accompagné par l’intérêt mondial croissant concernant la transition énergétique, la Covid-19 a fortement impacté la consommation d’énergie fossile. Dans le monde, entre le premier trimestre 2019 et le premier trimestre 2020, la consommation de pétrole a reculé de 9%; celle de charbon de près de 8% et celle de gaz naturel de 4,5% ; alors que la part de la consommation en énergies renouvelables a augmenté de 1,5%.
Quels sont les enseignements tirés du premier confinement ?
Aujourd’hui, il est encore trop tôt pour affirmer avec certitude que la reprise de l’activité économique engendre une hausse significative de la consommation énergétique par rapport à la période pré-confinement. Cependant, nous pouvons affirmer que ce confinement a profité provisoirement à l’écologie. En effet, les émissions mondiales de CO2 ont reculé de 5 % par rapport à 2019. On a vu alors apparaître des images de la Nasa montrant une chute très importante de la pollution en Chine par exemple. Cette chute d’émissions de CO2 est principalement due à une baisse globale de la consommation énergétique.
Nous le savons, la crise sanitaire a eu un impact majeur sur l’économie et nous allons maintenant voir les conséquences qu’elle a eu sur les investissements dans le secteur de l’énergie.
L’investissement dans le secteur de l’énergie
La Covid est venue bouleverser le secteur de l’énergie. En France, tous les acteurs du secteur ont été touchés. Par exemple, Total a annoncé la réduction de 20 % de ses investissements en 2020. Cependant les investissements n’ont pas chuté pour tout le monde. Pour RTE, malgré la crise sanitaire et un retrait de 12% de l’EBITDA par rapport à 2019, l’entreprise a su maintenir ses investissements, en réalisant une augmentation de 5% par rapport à 2019. Pour 2021, RTE a défini un programme d’investissement de plus d’un milliard d’euros qui se base sur trois piliers :
- L’adaptation de son réseau aux nouvelles énergies,
- La gestion de l’équilibre du réseau,
- Le développement de son réseau marin.
En ce qui concerne l’international, l’AIE note une chute historique des investissements dans l'énergie due à la crise sanitaire et économique. En effet, les investissements dans le secteur de l’énergie au niveau mondial se sont effondrés de 10% en 2020. Cependant, IFP Énergies nouvelles apporte une nuance et précise que les investissements mondiaux dans la transition énergétique ont effectué un tournant. En effet, dans le secteur pétrolier et gazier, les investissements en exploration-production se sont effondrés de plus de 30% en 2020 contrairement aux investissements mondiaux dédiés à la transition énergétique (378 milliards de dollars en 2020 pour l’un contre 501 milliards de dollars pour les investissements mondiaux pour l’autre).
Accélération ou ralentissement de la transition énergétique ?
On pourrait donc se dire que la Covid a permis d’accélérer l’investissement dans la transition énergétique, mais qu'en est-il réellement ? Pour certains, la crise sanitaire représenterait une occasion unique de réellement décarboner l’énergie et conforter les changements de comportements. Pourtant, les énergies renouvelables restent moins intéressantes économiquement que les énergies fossiles. Alors qu’est ce qui pousserait à opérer un tel changement ?
Pour d’autres, la crise et les incertitudes économiques associées pourraient au contraire entraîner une baisse des investissements dans les infrastructures liées à la transition énergétique.
Pour utiliser cette opportunité de changement et réaliser un tournant vers les énergies renouvelables et un monde décarboné, un cadre politique plus structurant est nécessaire. Seuls les gouvernements ont le pouvoir et la responsabilité de mettre en place des actions pour accélérer la transition énergétique et atteindre les différents objectifs climatiques.
En conclusion, la crise sanitaire a eu des répercussions économiques sans précédent qui ont vu la consommation énergétique globale chuter. Les grands acteurs de l’énergie ont dû aussi revoir leurs programmes d’investissements. Cependant on a aussi observé le taux d’émissions CO2 s'effondrer, une consommation plus verte et des investissements qui se réorientent vers une transition énergétique. L’avenir reste incertain à tous niveaux et on peut se demander vers quel scénario allons-nous nous tourner : un monde plus vert ou un monde toujours aussi carboné avec un retour avant la crise ?
Louis-James Sharpe & Amutha Dharmalingam
