Le marché des EDtech en France: quelles perspectives d'évolution en 2023 ?

La France ne déroge pas à ce constat puisque le marché de l'EdTech a largement atteint le cap du milliard d'euros en termes de chiffre d’affaires depuis janvier 2022. Selon Anne-Charlotte Monneret, directrice générale de EdTech France, « Notre pays compte plus de 500 acteurs, répartis en segments distincts : le scolaire, la formation professionnelle ainsi que l’enseignement supérieur. Certes, cet écosystème est naissant mais a pu créer plus de 10 000 emplois depuis l’apparition de la crise du COVID 19 ».
 
Le secteur a su également séduire les investisseurs français et internationaux puisque plus de 487 M d’euros ont été investis au sein des EDTech. Aujourd’hui, plus de 100 EdTech ont vu le jour entre 2020 et 2022 (Données EdTech France) et ont accéléré l’innovation dans le domaine de l’éducation numérique.

Néanmoins, mis à part quelques grands noms du marché, la majorité des EDtech sont encore de jeunes startups devant évoluer dans un environnement fragile et incertain où les tendances évoluent très rapidement et dans lequel ces dernières se doivent de garder le cap en termes d’innovation et d’agilité.
Dans cette optique, quelles sont les tendances les plus prometteuses à suivre par l’industrie de la EdTech en 2023 ? Et quels sont les freins auxquels les EdTech françaises feront face ?
 
Suite à la tenue du BETT Show en mars 2022 à Londres, salon prospectiviste dédié au secteur des technologies de l’éducation regroupant tous les acteurs mondiaux de la Edtech, plusieurs tendances émergent ou se confirment lors de cet évènement.

Le social Learning

Cette méthode d’apprentissage informelle est de plus en plus prisée par les acteurs de la EdTech anglo-saxons et asiatiques ; qui ont très vite compris que les réseaux sociaux, les communautés ainsi que l’apprentissage collaboratif étaient de réels leviers de réussite sur ce marché. Cette pratique permet aux personnes d’apprendre et de se former grâce au principe de partage des connaissances via des apprenants, des experts ainsi que des sources formelles de connaissances.
Selon Mila Semeshkina, experte en éducation numérique, « cette tendance émerge de plus en plus chez plusieurs Startups de la EDtech et verra le jour au sein des plus grands acteurs du secteur jusqu’à s’institutionnaliser. »

L’Immersive Learning

L’apprentissage immersif donne accès à la possibilité de concevoir un environnement créé à partir d’images de synthèse en 3 dimensions, dans lequel l’apprenant est plongé d’une manière immersive à l’aide de casques et proposant un espace de simulation idéal pour la formation.
L’immersive Learning peut se décliner en réalité virtuelle dans un environnement à 100 % virtuel ou en réalité augmentée via laquelle l’apprenant évolue dans une réalité enrichie d’éléments virtuels.

La Big Data et l’Adaptive Learning

Comme tout secteur lié au numérique, l’éducation numérique ne déroge pas à la règle avec le développement de l’utilisation du Big Data par les acteurs de la Edtech. Les mégadonnées ont ouvert la voie à plusieurs nouvelles solutions éducatives permettant l’hyper personnalisation de l’expérience apprenant.

Les Serious Games et la gamification

Ces deux pratiques qui se basent sur les principes des jeux vidéo permettent à l’apprenant d’accroître ses compétences tout en s’amusant et en se gratifiant. Ces deux tendances favorisent non seulement la mémorisation rapide des informations mais également la motivation chez les plus jeunes.
 

Les tendances citées ci-dessus témoignent des multiples possibilités et technologies à saisir par les EdTech françaises dans un marché très concurrentiel certes mais loin d’être mature.
Les EdTech doivent également faire face à des enjeux et défis risquant de freiner leur croissance et d’altérer leur positionnement dans le marché national et mondial.

En effet, malgré la mise en place d’un écosystème favorisant l’émergence et la croissance des EdTech, composé d’opérateurs divers du secteur public et du secteur privé, il y a plusieurs facteurs pouvant constituer un réel frein pour le développement et l’accroissement de ces acteurs.

Les facteurs économiques

Le marché des EdTech se caractérise par sa fragmentation et l’hétérogénéité de ses acteurs. Les Business models, tailles et fonctionnement de ces acteurs français contribuent à la difficulté de créer une réelle synergie entre ces derniers. De plus, les financements dont bénéficient les startups françaises spécialisées dans l’éducation numérique sont beaucoup moins conséquents comparé à d’autres acteurs internationaux qui mobilisent plusieurs acteurs étatiques et privés afin de soutenir leur rayonnement sur le plan international. Cela s’explique par l’existence de peu de fonds d’investissements privés français et d’incubateurs spécialisés.

Les facteurs institutionnels et réglementaires

Le domaine de l’éducation en France est un domaine régi et contrôlé par le gouvernement, le ministère de l’éducation nationale ainsi que les académies garantes de la mise en œuvre des stratégies établies en matière d’éducation numérique. Cette organisation multiplie le nombre d’interlocuteurs-acheteurs et limite par conséquent les possibilités s’offrant aux entreprises de la EdTech au niveau national.
D’autant plus que la France se caractérise également par la lourdeur de la réglementation des marchés publics. Les nombreuses startups du marché font souvent face à des processus d’achats complexes qui peuvent retarder leur croissance.

Force est de constater également qu’il existe des disparités territoriales notoires compte tenu de l’hétérogénéité des budgets communaux et des infrastructures techniques établies afin de faciliter la mise en place d’un système éducatif numérique. 

Les facteurs culturels

Laurent Tessier précise dans son ouvrage que plusieurs idées limitantes au sujet de la technologie sont ancrées dans la culture française : « Notre méfiance à l’égard de la technologie et des GAFAs nous suit depuis plus de 60 ans, et nous a malheureusement fait perdre notre place de leader dans la course internationale de l’innovation éducative. En France, nous consacrons moins de 10 euros par enfant et par mois aux solutions numériques. Une fois les investissements faits sur les outils numériques, il ne reste que peu de budget pour les contenus éducatifs. »
 
Le marché des EdTech post-crise est toujours aussi prometteur pour les acteurs et ne cesse de s’accroître, toutefois, la France a encore plusieurs axes d’amélioration à mettre en œuvre afin de s’aligner sur les stratégies et moyens adoptés par d’autres puissances mondiales afin de rayonner à l’international.

Cela ne saurait tarder tant les innovations dans la formation et l’éducation sont des enjeux primordiaux à la fois pour les acteurs concernés mais également pour les pouvoir publics, comme le montrent les nombreuses politiques et moyens dédiés à l’écosystème de la EdTech.