La montée des Chief Data & AI Officers : évolution ou mutation des rôles de gouvernance ?
Plongez dans l’évolution du Chief Data Officer vers le CDAO, ce nouveau pilier où IA, éthique et valeur business se rencontrent pour bâtir la confiance de demain.
Quand la donnée ne suffit plus
Il y a dix ans, quand les premiers Chief Data Officers (CDO) sont arrivés dans les grandes entreprises, leur mission semblait claire : remettre de l’ordre dans la donnée. Nettoyer, structurer, fiabiliser. En bref, transformer une ressource dormante en actif exploitable.
Aujourd’hui, le paysage a changé. L’intelligence artificielle s’est imposée comme sujet stratégique, et avec elle une nouvelle fonction : le Chief Data & AI Officer (CDAO).
Alors, simple “update” du titre ou véritable mutation du rôle ?
1. Du gardien de la donnée au chef d’orchestre de l’IA
Si le CDO était perçu comme le gardien de la donnée brute, le CDAO est désormais le chef d’orchestre d’un écosystème complexe, où interagissent :
les data scientists, qui conçoivent les modèles ;
les juristes, qui veillent au respect du RGPD et demain de l’AI Act ;
les métiers, qui attendent des résultats tangibles en termes de productivité ou d’expérience client ;
les équipes cybersécurité, qui doivent protéger modèles et données.
Le CDAO n’est pas un simple manager technique. Il est un diplomate, un stratège, et un ambassadeur de la confiance algorithmique.
2. Pourquoi le rôle a changé ?
L’IA a bouleversé la donne. La donnée n’est plus seulement un actif à gérer, c’est la matière première de systèmes qui influencent directement le quotidien : recommandations, scoring, automatisation de processus, relation client…
Mais ces usages posent trois grandes questions :
- Éthique et confiance : peut-on expliquer les décisions des modèles ? Peut-on garantir qu’ils ne reproduisent pas de biais ?
- Réglementation : après le RGPD, l’AI Act européen vient imposer de nouvelles contraintes.
- Valeur business : comment démontrer que l’IA ne reste pas au stade de l’expérimentation, mais génère un vrai retour sur investissement ?
C’est précisément à ce carrefour que le CDAO intervient.
3. Des cas concrets qui montrent la mutation
- Chez L’Oréal, le rôle de la CDAO est décrit comme celui d’un chef d’orchestre de l’IA éthique. Pas question de déployer des modèles qui mettraient à mal la confiance des clients. L’IA est intégrée, mais toujours au service de la marque et de ses valeurs. Source
- Chez Sanofi, l’IA soutient la recherche pharmaceutique. Le CDAO doit garantir que les modèles end to end soient robustes, scientifiquement solides et conformes à des réglementations extrêmement strictes. Ici, son rôle est autant scientifique que diplomatique. Source
- Chez BNP Paribas, le CDAO s’est retrouvé en première ligne pour déployer des modèles de scoring, tout en rassurant les métiers et en dialoguant avec les régulateurs. Source
Dans chacun de ces cas, la clé n’est pas la technologie seule, mais la capacité à fédérer et à instaurer la confiance.
4. Les défis humains du CDAO
Derrière les algorithmes, il y a toujours des humains. Et c’est souvent là que les choses se jouent :
- Convaincre les métiers : expliquer que l’IA n’est pas une boîte noire qui les remplace, mais un outil qui les aide.
Mes recommandations : « Partez des irritants quotidiens des métiers : démontrez concrètement comment un cas d’usage IA leur fait gagner du temps ou réduit un risque. Rien n’est plus convaincant qu’une petite victoire visible. »
- Former et acculturer : accompagner les collaborateurs dans la compréhension des enjeux.
Mes recommandations : « Évitez le jargon. Privilégiez des formats courts et interactifs (quiz, ateliers, démonstrateurs) dans le but de créer une culture commune et rassurante. »
- Attirer et retenir les talents : les profils data et IA sont rares, et la fidélité se construit plus par le sens et la vision que par la rémunération.
Mes recommandations : « Offrez-leur de l’impact : laissez vos talents présenter leurs projets au COMEX, impliquer les métiers dès le début, et créer des parcours de carrière visibles. L’appartenance naît de la reconnaissance. »
- Gérer les tensions internes : arbitrer entre innovation rapide et contraintes réglementaires, entre agilité et sécurité.
Mes recommandations : « Positionnez-vous comme médiateur : instaurez des “zones pilotes” où l’innovation est encouragée, tout en gardant un cadre de gouvernance clair. Cela permet d’expérimenter sans effrayer les risk managers. »
“Le rôle d’un CDAO n’est pas de construire les modèles. C’est d’assurer que tout le monde ait confiance dans ce qu’on fait, des clients jusqu’au COMEX. ”
5. Et demain ?
Les analystes comme Gartner prévoient que d’ici 2026, 75 % des CDAO qui n’auront pas démontré d’impact mesurable seront réduits à un rôle purement technologique (Source). Ce n’est donc plus une option, la gouvernance des données et de l’IA s’impose désormais comme un pilier stratégique pour créer de la valeur durable.
Le CDAO n’est pas un CDO “augmenté”. Il doit créer de la valeur mesurable avec l’IA, tout en assurant confiance, transparence et responsabilité. Ce rôle hybride, à la fois technique, réglementaire et business, sera l’un des pivots de la gouvernance des grandes organisations dans les années à venir.
Conclusion
Alors, évolution ou mutation ?
Tout indique que nous sommes face à une transformation en profondeur. Le CDAO incarne le passage d’une gouvernance centrée sur la donnée à une gouvernance centrée sur l’usage et ses impacts économiques, réglementaires, humains.
Et c’est peut-être là l’enseignement le plus fort : dans un monde saturé de technologies, le rôle du CDAO nous rappelle que la question centrale n’est pas ce que l’IA peut faire, mais comment nous choisissons de l’utiliser, et avec quelle responsabilité ?
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