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Le design thinking, ou comment favoriser l’innovation dans les projets SI

Publié le
25 novembre 2020
Systèmes d'information

Pratique pourtant loin d’être nouvelle et initialement plutôt utilisée dans des secteurs centrés sur les services (notamment dans les Médias et le Retail), le design thinking connaît depuis quelques années une seconde jeunesse. De nouvelles entreprises commencent à s’y intéresser pour ses bénéfices attendus : remettre en cause les certitudes et favoriser l’innovation.

A l’ère de la transformation numérique, de nouvelles exigences utilisateurs ont émergé


Depuis plusieurs décennies maintenant, on a pu observer l’évolution progressive de ce qui constitue la valeur économique. Un article de référence sur le sujet citait déjà en 1999 : « Aujourd’hui [...] ce sont les services qui deviennent des marchandises. Les expériences représentent le nouveau type de valeur économique, avec les services comme scène et les biens comme piliers. » (B. Joseph Pine II, The experience economy, 1999). Concrètement, cela signifie que l’expérience finale d’un utilisateur joue maintenant un rôle central dans le succès d’un produit (et donc d’un projet), parfois même davantage que l’invention de la technologie associée.

À l’ère de la transformation numérique, ce constat est largement conforté et les entreprises ont pu constater le renforcement des exigences des utilisateurs en matière d’UX [1]. Sujet parfois considéré comme secondaire dans le passé, l’expérience finale proposée devient maintenant un enjeu primordial dans les projets SI, que le produit s’adresse à des clients ou à des collaborateurs de l’entreprise. Le design thinking apporte justement la promesse de mettre cette expérience utilisateur au centre du projet en organisant la réflexion autour de son design.

Privilégier la visualisation pour favoriser l’innovation


Conscientes du changement de paradigme, les entreprises tentent d’intégrer au maximum cette pratique au sein de leurs projets. Le design thinking regroupe un ensemble de méthodes et outils qui visent à se rapprocher de la démarche d’un designer. Il repose particulièrement sur la visualisation et la « prototypisation » des concepts à travers trois étapes clés :

  • Identifier et comprendre la problématique posée et son environnement
  • Trouver un concept qui permettra d’y répondre
  • Donner une forme à ce concept

L’objectif est de donner une forme aux problèmes afin de partager une « histoire visuelle » facilitant la compréhension des différents acteurs et l’exploration de nouvelles idées, là où réside la clé de l’innovation. En favorisant le partage entre différents acteurs, le design thinking a pour ambition de concilier à la fois l’intérêt porté au produit, la faisabilité et la viabilité du produit.

Schéma : Les trois aspects que le design thinking cherche à réconcilier
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En gestion de projet, le design thinking est souvent associé à des méthodologies de projet Agiles car c’est une pratique davantage expérimentale, qui nécessite beaucoup d’échanges itératifs, cherchant justement à rompre la linéarité d’une gestion de projet « cycle en V » classique. Pour autant, il reste possible de reprendre des pratiques du design thinking dans un projet classique : organisation d’un POC, animation d’ateliers avec des méthodes innovantes, etc.

Parmi les nombreux exemples d’application, on pourra citer la méthode Lego Serious Play, qui consiste à modéliser des problématiques en réalisant des constructions faites de briques Lego. Cela permet de donner une forme à des problèmes abstraits et complexes afin de favoriser l’engagement et la créativité dans leur résolution. Dans les projets SI c’est une méthode notamment très utilisée dans l’accompagnement du changement, mais ses applications sont nombreuses : ateliers d’expression de besoin, conception d’une stratégie de recette, …

La « pensée design », clé ultime de différenciation et du succès d’un projet ?


Les entreprises ne mettant pas la « pensée design » au cœur de leurs pratiques, elles sous-estiment assez largement les bienfaits de ces pratiques (40 à 50% en moyenne [2]). En effet, lorsque cela est réussi, penser l’expérience utilisateur au cœur du projet permet de créer de la satisfaction, de la fidélité, et parfois de créer chez les utilisateurs des « supporters » servant d’équipe marketing de terrain, et pouvant offrir un avantage concurrentiel notable. On pourra par exemple citer la startup « Capitaine Train » (depuis rachetée par Trainline) qui a réussi à se démarquer sur le marché de la vente en ligne de billets de train du géant SNCF en proposant à ses utilisateurs une expérience rapide et intuitive, au point de devenir aujourd’hui un acteur important du marché.

Le design thinking n’est cependant pas sans son lot d’inconvénients. C’est une méthode qui apporte souvent un sentiment d’incertitude et de prise de risque permanente qui peut déstabiliser certains acteurs projet. La culture d’entreprise joue un rôle clé dans le succès d’implémentation du design thinking, et s’il facilite la créativité, il ne permet pas à lui seul l’évolution des états d’esprit. Ce n’est pas non plus une pratique adaptée à tous les projets SI. La clé du succès d’un projet d’implémentation d’un progiciel standard reposera par exemple beaucoup moins sur l’innovation et la pensée UX que la création d’une nouvelle application mobile.

En synthèse : le design thinking, même s’il peut être source de confusion et ne doit pas systématiquement être vu comme la solution à adopter, a le mérite de proposer des méthodes et outils qui vont favoriser l’innovation et ouvrir la voie à la différenciation. Ces deux points étant souvent négligés en gestion de projet SI, le design thinking peut constituer un réal avantage compétitif pour une entreprise.

[1] User eXperience, ou expérience utilisateur en français.

[2] « Design-Led Firms Win The Business Advantage » Forrester (2016)

 

Sources:

« Design-Led Firms Win The Business Advantage » Forrester (2016)
« The experience economy » B. Joseph Pine II (1999)
« Design thinking : un outil qui favorise l’innovation et remet en cause les certitudes dans l’entreprise » Harvard Business Review (2017)

Loïc GRIFFON
Project Manager