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Interopérabilité en santé : de la promesse à la réalité

Santé
07 octobre 2025

L’interopérabilité est devenue un mot-clé du numérique en santé. Elle est au cœur des stratégies nationales, des appels à projets et des feuilles de route. Et pourtant, sur le terrain, la réalité est bien différente : les systèmes “ne se parlent pas”, les données ne circulent pas et les professionnels doivent composer, chaque jour, avec des outils qui ne facilitent ni la coopération ni la coordination.

 

Alors que d’importants investissements sont consacrés à la modernisation des systèmes d’information hospitaliers (SIH), comment expliquer un tel écart entre les ambitions affichées et la réalité du terrain ? S’agit-il d’un problème technologique, de gouvernance, ou d’un manque de volonté collective ?

Une promesse floue, des usages fragmentés

Tous les acteurs du secteur de la santé parlent d'interopérabilité, mais rarement dans le même sens. Pour les uns, c’est une affaire de normes techniques. Pour d’autres, un enjeu sémantique, fonctionnel ou organisationnel. Résultat : les initiatives partent dans tous les sens, sans cadre commun, et peinent à se concrétiser.

Sur le terrain, les soignants jonglent entre des logiciels qui ne communiquent pas, des dossiers incomplets et une absence de vision globale du patient. Le quotidien est fait de doublons, de perte de temps, de copier-coller et parfois d’erreurs évitables. Cette fragmentation, au-delà d’être pénible, fatigue les professionnels et nuit à la qualité des soins.

Les causes sont bien connues :

  • Des systèmes hérités du passé, rarement pensés pour s’interconnecter.
  • Des médecins réfractaires au changement.
  • Des éditeurs parfois peu enclins à ouvrir leurs solutions.
  • Des freins institutionnels aux intérêts stratégiques parfois divergents, tels que le ministère, la CNAM ou certains éditeurs majeurs.
  • Une coordination encore trop faible entre les DSI, les directions métiers et les éditeurs.
  • Une gouvernance SI souvent absente ou peu structurée au niveau des GHT et des établissements.
  • Le coût lié au passage vers des solutions logicielles interopérables.

Non, une norme ou une API ne suffisent pas

Nous avons trop souvent voulu résoudre le sujet de l’interopérabilité par la technique : il suffirait d’utiliser une norme, comme HL7 ou FHIR, ou de développer des API (Application Programming Interface). Cependant, ce raisonnement oublie l’essentiel ; l’interopérabilité ne repose pas seulement sur des flux d’échange, mais sur des usages.

Ce n’est pas parce que deux systèmes peuvent échanger des données qu’ils le font de manière utile et exploitable. Il faut tenir compte des pratiques de terrain, des parcours patients, des contraintes métiers, des habitudes et de la culture du partage. Sans cela, les outils restent sous-exploités, ou pire, rejetés.

Ce que nous défendons au sein de mc2i

Au sein de mc2i, nous capitalisons les retours d’expérience issus de nos missions auprès des  établissements, GHT, ARS, éditeurs de logiciels métiers et institutionnels. Nous observons que l’interopérabilité ne peut plus être un sujet à part. Elle doit faire partie intégrante de toute démarche de transformation.

Voici nos convictions :

  • L’interopérabilité doit être pensée dès le départ, dès la conception des projets SI, et non ajoutée a posteriori.
  • Elle doit être co-construite, entre DSI, métiers, éditeurs, tutelles et surtout avec les utilisateurs finaux.
  • Elle doit devenir un levier de transformation, en facilitant des parcours plus fluides, plus lisibles et plus coordonnés.
  • Elle doit être suivie comme un vrai indicateur de maturité numérique, valorisé dans les stratégies régionales et nationales.

Par ailleurs, mc2i s’engage aux côtés des acteurs du secteur dans l’effort collectif en faveur de l’interopérabilité, notamment à travers des projets inscrits dans des programmes structurants comme le Ségur du numérique en Santé. Ce programme a posé un cadre clair et incitatif aux éditeurs de logiciels métiers médicaux, permettant des avancées concrètes en matière de normalisation, d’ouverture des logiciels et de partage des données. Cependant, un écart persiste entre la conformité aux exigences du Ségur et l’usage fluide, intégré et quotidien des outils sur le terrain.

Agir, ensemble, et maintenant

Nous ne pouvons plus nous contenter d’attendre que toutes les conditions soient réunies. Face aux tensions sur les effectifs, aux besoins accrus de coordination et aux attentes des patients, le numérique doit devenir un véritable appui. Pour cela, l’interopérabilité ne peut rester au stade de l’intention : elle doit se traduire concrètement dans les usages quotidiens.

Faisons en sorte que l’interopérabilité ne soit plus seulement un principe affiché, mais une réalité partagée, visible et utile à tous.

Le sujet vous intéresse ? Nos experts vous répondent

Cyrielle Lucas
Senior Partner - Directrice de l'Offre Santé

Convaincu que le numérique peut aider les organisations et les Hommes à mieux gérer notre santé, mc2i a construit une solide expertise des problématiques rencontrées par les différents acteurs de l’écosystème santé et les accompagne sur le pilotage du système de santé, l'offre de soins, la sécurité sanitaire et la santé au travail.

Lauren ABI CHACRA
Consultant en transformation digitale