Déréférencement des médecines alternatives sur Doctolib
Suite à la polémique sur la naturopathie ayant éclaté fin août, Doctolib décide de limiter sa liste de praticiens aux professions réglementées.
Le mercredi 26 octobre, le cofondateur et PDG de Doctolib, Stanislas Niox-Chateau, a annoncé au journal Le Monde que les professions non réglementées allaient être déréférencées de la plateforme. Cette décision fait suite à une polémique ayant éclaté fin août au sujet de la naturopathie, une forme de médecine alternative.
L'entreprise, en tant que leader dans la gestion de la prise de rendez-vous médicaux est une victime collatérale de la polémique. Dans un communiqué Twitter, l’ordre des médecins avait demandé le 23 août dernier à la start-up de renforcer ses règles d’inscription.
Ces actions amènent de nombreuses questions. Tout d’abord, quelles conséquences cette décision aura-t-elle sur l’activité de ces praticiens et sur l’utilisation de leurs services par les clients ? Ce déréférencement risque-t-il de laisser la porte ouverte à une vague d’arnaques au sein des médecines alternatives ? Serait-il bénéfique de cadrer ces pratiques de la même manière que les professions réglementées ?
La polémique
Le 22 août 2022, L’Extracteur (collectif en lutte contre les médecines alternatives) a publié une vidéo sur Twitter dans le but de dénoncer la naturopathie. On voit dans la vidéo une grande figure de la naturopathie tenir des propos controversés et vanter les mérites de pratiques jugées dangereuses par le collectif. La naturopathie est une pseudoscience suivant cette ligne directrice : ce qui provient de la nature est bénéfique pour l’Homme, et ce qui n’en provient pas lui est néfaste.
Suite à la publication de la vidéo, la société Doctolib a été visée. Les dénonciations portent sur le fait que la plateforme permette aux utilisateurs de prendre rendez-vous avec ces praticiens en toute simplicité. Le lendemain, l’ordre des médecins publiait un communiqué appelant la start-up à repenser l’accès à sa plateforme pour les professionnels de santé non référencés. On peut notamment y lire “Doctolib ne peut laisser s’installer une confusion entre les professionnels de santé et les personnes ne s’inscrivant pas dans l’exercice médical”.
Être référencé, kesako ?
Pour être référencé par les autorités sanitaires, un professionnel de santé doit détenir un diplôme d’état et un numéro RPPS ou ADELI.
RPPS signifie Répertoire Partagé des Professionnels de Santé. Derrière ce numéro unique, on retrouve l’identification, les diplômes et l’activité de chaque professionnel de santé. Comme indiqué sur le site d’Ameli, “le RPPS concerne pour l'instant les médecins, les sages-femmes, les chirurgiens-dentistes et les pharmaciens”.
Le répertoire ADELI contient 22 professions supplémentaires : assistants dentaires, assistants de service social, audioprothésistes, chiropracteurs, diététiciens, épithéistes, ergothérapeutes, infirmiers, manipulateurs en radiologie, ocularistes, opticiens lunetiers, orthopédistes orthésistes, orthophonistes, orthoprothésistes, orthoptistes, ostéopathes, physiciens médicaux, podo-orthésistes, psychologues, psychomotriciens, psychothérapeutes et techniciens de laboratoire.
Le RPPS a pour but à terme d’englober l’ensemble des professionnels de santé, dont ceux jusqu’alors identifiés grâce au répertoire ADELI. Le numéro RPPS sera donc à terme le numéro unique de tout professionnel référencé, remplaçant alors le numéro ADELI.
Ces listes contredisent un raccourci trop vite fait : les professionnels de santé référencés ne sont pas uniquement ceux dont les activités sont indemnisées par l’assurance maladie.
Comme nous venons de le voir, beaucoup de professions sont référencées. Quelles sont donc ces médecines alternatives auxquelles la décision de Doctolib s’applique ? Parmi les pseudo-médecines on retrouve donc la très controversée naturopathie, mais également les coachs en développement personnel, magnétiseurs, médiums, litho thérapeutes etc.
Néanmoins, il arrive que certains praticiens référencés proposent en complément des actes médicaux alternatifs. On retrouve par exemple des médecins généralistes proposant des séances d’acupuncture. Ces professionnels étant référencés, ils ne seront pas touchés par la décision de Doctolib.
Les actions à court terme de Doctolib et ses conséquences
Initialement, Doctolib avait laissé l’accès à sa plateforme aux activités médicales mais également aux médecines douces. Ils avaient jugé celles-ci comme légitimes face aux demandes des patients. Cependant, comme indiqué par Doctolib, “Il n’existe pas de moyen objectif et exhaustif de définir et vérifier le niveau de qualification des praticiens exerçant des activités de bien-être, comme cela est possible pour les professions réglementées”.
Parmi les 320 000 professionnels enregistrés sur la plateforme, 5 700 praticiens sont concernés. Ils devront trouver un nouveau moyen d’assurer leur visibilité et de gérer la prise de rendez-vous. Concrètement, Doctolib a d’ores et déjà envoyé une notification envers les professionnels non référencés sur sa plateforme, et leur laisse, à compter de cette notification, une marge de 6 mois pour s’organiser. Ils seront ensuite enlevés du répertoire de la startup.
Comme annoncé en introduction, cette mesure apporte des questionnements. Les médecines alternatives sont réputées pour être des nids à arnaque. Cependant, comment différencier les praticiens ayant foi dans leur profession des imposteurs ? Y aurait-il un moyen d’encadrer certaines de ces activités afin d’évaluer de manière objective le niveau de compétence des praticiens ? Comment guider au mieux les personnes croyant aux bénéfices des médecines douces et sécuriser ce domaine ?
De plus, de futurs challenges attendent la start-up. Ces derniers mois une augmentation massive des arrêts maladie fournis par téléconsultation a été constatée. Seuls les arrêts de travail délivrés par le médecin traitant sont désormais acceptés via téléconsultation. Comment Doctolib s’organisera-t-elle pour répondre à cette nouvelle problématique ?
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