Le quantum computing et ses applications à la data

Le Quantum computing, anglicisme d’informatique quantique, n’aurait presque d’informatique que le nom et il est pourtant sur le point de révolutionner nos métiers du numérique. En effet, les technologies développées dans ce domaine s’éloignent du domaine de l’électronique, elles sont issues de principes de la mécanique quantique et sont à ce jour encore en phase de recherche.
Pourtant, malgré un faible niveau de maturité sur ce domaine, nous constatons que le nombre de projets quantiques est en forte augmentation, appuyés par de nombreux investisseurs, industriels et acteurs aussi bien privés que publics. Par exemples :
- Le gouvernement français ambitionne par exemple de se donner “5 ans pour asseoir la France dans le premier cercle mondial” avec un “financement cumulé de l’Etat d’environ 1 Md€ sur quatre ans, pour un engagement global public-privé de 1,8 Mds€” (source).
- Ainsi, “la France et l'Île-de-France figurent parmi les leaders mondiaux en matière de recherche fondamentale” (source).

- L’Union européenne a également annoncé en 2018 des financements à hauteur de 1 Md€ sur dix ans (FET flagship). D’autres États européens, comme l’Allemagne, suivent également cette dynamique.
- Sur la scène internationale, la Chine et les Etats-Unis s’inscrivent également dans cette course aux investissements.
Pourquoi un tel engouement ? Pourquoi tant d’investissements ?
Depuis de nombreuses années, la demande en puissance de calcul ne fait que croître. Gordon Moore, co-fondateur d'Intel, avait alors fait le constat dès 1965 que l’évolution technologique permettrait le doublement des transistors que contient une puce (i-e des capacités de calcul) à coût constant environ tous les 2 ans (loi de Moore). Cette augmentation exponentielle des capacités de calcul arrive aujourd’hui à un plafond physique où il n’est pratiquement plus possible de suivre ce modèle. Par ailleurs, l’équation écoénergétique ne sera rapidement plus tenable.
Si la masse monétaire engagée dans ces projets est si importante, c’est parce que nous sommes contraints à une rupture technologique pour répondre aux enjeux de demain : Le quantum computing
A quoi cela va-t-il bien pouvoir servir ?
De nouveaux services offerts :
Bien qu’encore en phase expérimentale, les premiers projets d’envergure commencent à voir le jour avec l’inauguration en 2021 du premier ordinateur « Quantum System One » par IBM hors des États-Unis (dévoilé en 2019 aux USA). L’heureux élu est l'institut de recherche allemand Fraunhofer (à qui l’on doit l’algorithme de compression MP3) qui va pouvoir disposer d’un outil révolutionnaire pour la résolution de problèmes de sciences appliquées de plus en plus complexes.
Avec cette nouvelle, IBM marque un point dans sa course face à Google ou Microsoft dans un contexte d’innovation Hardware en produisant des processeurs de plus en plus performants et compatibles avec le concept de qubit (ou bit quantique).
Concernant la question des prochaines étapes de généralisation de cette technologie et surtout de l’application opérationnelle, IBM dévoile une roadmap :

Nous constatons sur cette roadmap que IBM prévoit dès 2023 de mettre à disposition des services cloud (API) aux développeurs afin de leur permettre d’explorer les modèles quantiques mis à disposition, de construire leurs circuits quantiques (algorithmes appliqués aux calculateurs quantiques) et tout cela sans rentrer dans les notions de physique quantique. L’objectif étant de rendre accessible et possible la résolution de problématiques aujourd’hui insolubles dans les domaines des sciences naturelles, de la finance, de l’optimisation et du machine learning.
Les autres grands acteurs du secteur suivent également cette tendance du quantum computing as a service (QCaaS) : Microsoft Azure Quantum, AWS Braket, Alibaba Cloud.
L’ensemble de ces acteurs comptent déjà sur un panel de clients qui éprouvent leurs cas d’usages sur ces technologies. On peut par exemple citer l'université Case Western Reserve (Ohio) qui utilise Azure Quantum pour détecter des tumeurs.
De nombreux usages imaginés, mais...
Le dossier de présentation de la stratégie nationale pour les technologies quantiques résume les cas d’usages qui pourraient être couverts :
“[...] L’industrie bénéficiera de nouveaux outils de simulation et d’optimisation avec des impacts sociétaux importants, notamment en matière de santé, environnement ou énergie, grâce à la possibilité de simuler dynamiquement les molécules et leur action, ouvrant une nouvelle ère de la chimie, ou encore de prédire finement les propagations épidémiques ou d’optimiser le trafic de manière systémique en temps réel. Par ailleurs, les techniques d’ultra-refroidissement des atomes permettront de dépasser la précision de nos horloges atomiques et les capteurs quantiques bouleverseront nos futurs champs de bataille, en apportant de nouvelles fonctionnalités de navigation sans satellite, ou encore des capacités de détection inédites.
Les technologies quantiques représentent des enjeux de compétitivité et de souveraineté importants et nous serons demain en difficulté si nous ne disposions pas à terme de capacités technologiques propres dans le domaine ou si nous n’adaptions pas nos outils à ces nouvelles réalités. La puissance des ordinateurs quantiques permettrait par exemple, à qui en bénéficie le premier et en aurait l’intention, de casser de manière unilatérale les clefs de chiffrement aujourd’hui inviolables, notamment celles qui sont basées sur le protocole de chiffrement RSA, utilisé par exemple pour nos paiements sécurisés par carte bleue. C’est pourquoi il est crucial de se protéger de ce type de menaces avec des mesures cryptographiques appropriées, et d’en éprouver la robustesse avec nos propres moyens de calcul quantiques.”
Les principaux domaines couverts seraient donc :
- L’intelligence artificielle et le machine learning
- La cybersécurité
- La défense
- La finance
- La santé
- L’environnement, le climat
- Les transports
- Les télécommunications
- L’énergie...
Nous pourrions imaginer une quantité infinie de domaines d’application.Cependant, nous en sommes aujourd’hui à un niveau de capacité technologique dans le domaine du quantum computing que nous pourrions comparer à ce que nous étions en 1982 en termes de micro-processeur avec l’Intel 80286. Cela ne laisse en rien présager de la vitesse à laquelle vont évoluer les technologies quantiques, cependant cela permet de se situer sur notre niveau de connaissance actuel du domaine.
Nous avons encore presque tout à apprendre sur le quantum computing et il nous est ainsi impossible d’avoir connaissance aujourd’hui des usages qui pourront en être fait demain !
En 1982, nous n’avions pas connaissance que le Web serait créé en 1989 et encore moins qu’en 1997 une société comme Google verrait le jour et en ferait son fonds de commerce !
Un long chemin à parcourir mais un train à ne pas rater !
Bien que les applications du quantum computing restent à découvrir, nous savons de façon quasi certaine que cela aura un impact sur les SI des entreprises. Ces calculateurs quantiques seront à intégrer dans les systèmes d’information traditionnels. En effet, ils ne viennent pas supplanter les ordinateurs classiques mais fonctionnent de façon complémentaire et sont interdépendants. L’intégration de fonctionnalités issues de l’informatique quantique dans les SI va demander aux entreprises :
- D’un point de vue RH :
- de développer les compétences de leurs collaborateurs (physique quantique, nouveaux langages de programmation, …)
- de recruter de nouveaux talents sur un marché où encore plus que pour l’intelligence artificielle les experts sont rares
- d’acculturer l’ensemble des acteurs métiers aux principes du quantum computing afin de leur faire comprendre ce qu’il sera possible de réaliser ou non et qu’ils puissent appréhender comment ils pourraient en tirer une valeur ajoutée
- D’un point de vue organisationnel : D’adapter leurs processus métier en cohérence avec de des nouveaux gains d’efficacité constatés et/ou des nouveaux usages adressés
- D’un point de vue IT : De faire évoluer l’infrastructure pour pouvoir accueillir des outils et/ou des équipements différents de l’informatique classique
Au-delà du fait que les solutions commerciales sont encore très peu nombreuses, la maîtrise des différents aspects du quantum computing est actuellement détenue par un faible nombre d’experts, ce qui est un frein à l’adoption par les entreprises.
C’est pourquoi, tel que mentionné précédemment, des sociétés développent des solutions cloud (QCaaS) afin de proposer des services packagés nécessitant un niveau de compétences plus accessible pour les utiliser.
Ainsi, l'enjeu actuel pour les entreprises se situe au niveau de l’acculturation aux principes de l’informatique quantique pour en comprendre les enjeux et les opportunités et définir les feuilles de routes stratégiques SI afin de ne pas louper ce virage technologique.
Conclusion
La puissance de calcul offerte par les ordinateurs quantiques va permettre de décupler nos capacités de calcul actuelles et de faire des avancées majeures notamment dans les domaines de l’intelligence artificielle et du machine learning.
Comme nous l’avons vu précédemment, nous pouvons imaginer de nombreuses applications du quantum computing dans les domaines de la data. Mais le plus important à avoir à l’esprit est que “la data” d’aujourd’hui ne sera pas celle de demain : On ne pense pas « quantique » comme on pense « informatique ». Cette rupture technologique nous demandera donc de nous acculturer à l’informatique quantique, d’en comprendre la philosophie, de changer notre façon de réfléchir puis d’adapter notre façon d’appréhender les projets ainsi que nos méthodes de travail, pour comprendre et se faire comprendre des décideurs de demain.
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